Les vaisseaux spatiaux sont-ils un nouvel enjeu de souveraineté ?

Le Monde du 19 mai
Boeing va de nouveau tester la fiabilité de son vaisseau spatial Starliner ce jeudi 19 mai, qui devrait rallier la Station spatiale internationale et s’y arrimer. En cas de succès, Starliner sera, dès 2023, l’un des deux véhicules américains, avec le Crew Dragon de SpaceX, à emmener des astronautes vers l’ISS ou à les ramener, comme l’a décidé la NASA il y a près de huit ans. La NASA a aussi comme projet, à l’horizon 2030, le Lunar Gateway, une petite station spatiale internationale évoluant en orbite autour de la Lune. Plusieurs pays s’intéressent de près à l’installation lunaire, comme la Chine qui en fait un enjeu géostratégique, ou encore l’Inde, le Japon et les Emirats arabes unis. Si les Etats-Unis sont dotés de vaisseaux spatiaux, tout comme la Chine avec Tianzhou ou la Russie et ses Soyouz, l’Europe en est dépourvue. L’Agence spatiale européenne (ESA) participe néanmoins activement aux différents programmes internationaux de la NASA comme l’ISS, le vaisseau spatial Orion à destination de la Lune, ou le Lunar Gateway avec des contrats signés par ArianeGroup et Thales Alenia Space. « Pendant très longtemps, les lanceurs étaient considérés comme l’enjeu de souveraineté numéro un du spatial. C’est toujours vrai, mais la capacité à réaliser des vols habités et à développer des bases spatiales va devenir un sujet majeur », estime Philippe Baptiste, président du Centre national d’études spatiales (CNES). Ne pas avoir de vaisseaux européens peut être un handicap. L’arrêt des vols de Soyouz en Guyane pour Arianespace après le déclenchement de la guerre en Ukraine illustre cette dépendance. En février, à Toulouse, dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, Emmanuel Macron avait fixé les grands axes de la politique spatiale visant à garantir l’autonomie stratégique du continent, en évoquant devant les représentants de l’ESA la question de l’exploration et des vols habités. La directrice de la stratégie d’ArianeGroup, Morena Bernardini déclarait « Nous avons la technologie nécessaire pour réaliser des vols habités. Nous ferons ce que les Etats membres de l’ESA décideront et nous pourrons faire évoluer la nouvelle génération d’Ariane 6 soit en ajoutant un étage, soit une capsule. »